4 – Les châteaux de la subversion

« Allié par ma mère, à tout ce que le royaume avait de plus grand ; tenant, par mon père, à tout ce que la province de Languedoc pouvait avoir de plus distingué ; né à Paris dans le sein du luxe et de l’abondance, je crus, dès que je pus raisonner, que la nature et la fortune se réunissaient pour me combler de leurs dons ; je le crus, parce qu’on avait la sottise de me le dire, et ce préjugé ridicule me rendit hautain, despote et colère ; il semblait que tout dût me céder, que l’univers entier dût flatter mes caprices, et qu’il n’appartenait qu’à moi seul et d’en former et de les satisfaire. »

Cette citation de Sade tirée de son roman « Aline et Valcour » est la parfaite introduction pour la série estivale de cette année. Effectivement, cet été j’ai décidé de vous parler — du moins de vous présenter — les principaux châteaux où vécut le Marquis de Sade.

De sa naissance à sa mort, Sade traversa le pays. Du Sud au Nord en passant par la Bourgogne, Sade circula dans le royaume. Parfois dans le confort certain du luxe de ses châteaux. D’autres fois dans l’inconfort que pouvaient être les prisons de cette époque. Mais à chaque fois, ces étapes marquèrent sa vie au point de le hanter ou de les faire rejaillir dans ses histoires.

Quatrième étape d’un feuilleton que j’ai nommé « les châteaux de la subversion » en clin d’œil au livre d’Annie Lebrun : le Château de Lacoste.

Contrairement à toutes les armées antiques, lorsque les légions de la Rome antique se déplaçaient, elles construisaient chaque soir un camp fortifié ; un « castrum » en bon latin. Cette habitude, très ancienne, remonte très loin en amont de notre seigneur. Sachant, les Romains conquérants… des « Castra », ils ont dû en construire et en laisser un bon paquet derrière eux !

C’est ainsi qu’en 1038 A.D. un noble baron devient propriétaire d’un ancien « castrum » laissé à l’abandon. Des années après — oui je sais l’ellipse est grande — celui-ci est offert comme cadeau de mariage à notre célèbre Marquis. Trouvant la bâtisse un peu étroite, il entreprend de suite des travaux d’agrandissement. Hélas ! La Révolution faisant son œuvre, la demeure passe de mains en mains… Nous sommes en 1955, le nouveau propriétaire et son épouse organisent durant 4 années un « Festival de Lacoste » au cœur des ruines illuminées. Par la suite, jusqu’en 1978, ils transformeront les carrières du château en une salle de 1600 m2 au plafond de 7 mètres.

1994, M. Bouër s’éteint « dans l’espoir qu’un autre enthousiaste prenne un jour la relève ». 6 ans plus tard, sa femme contacte M. Pierre Cardin — célèbre couturier que l’on ne présente plus — afin que le projet de son mari trouve un écho ; l’année d’après, l’avenir du château trouve repreneur !

2017, M. Bouër peut remonter le tunnel l’esprit tranquille, le château est toujours là et son festival en est à sa 17ème édition et se déroule dans la salle qu’il a lui-même bâtie : les « Carrières du Marquis de Sade » à l’ouest du château. Ce festival, tourné vers le théâtre autant que vers l’opéra, offre aux spectateurs la découverte de jeunes talents à la carrière prometteuse, mais aussi une découverte de l’opéra pour les plus néophytes.

Marquis de Sade — 4 - Les châteaux de la subversion

Situé en plein cœur du Luberon, le Château de Lacoste vous accueille dans un cadre chargé d’une histoire et d’un passé évocateur. Le nom de son ancien propriétaire raisonne encore sur les pierres du Château comme l’écho d’un passé omniprésent.

Avant lui — avant Sade — le château servait essentiellement à la défense du village de Lacoste qu’il domine. Au IXème siècle, le fief de Lacoste est la propriété des Varac-Farald passant, dès le XIIIème siècle, à la puissante seigneurie d’Agoult qui devint ensuite la seigneurie de Simiane. Resté aux Simiane jusqu’au XVIIIème, le château est légué en 1716 par Isabelle de Simiane à son cousin Gaspard François de Sade, Seigneur de Saumane et de Mazan, également grand-père du Divin Marquis.

Bien qu’épargné dans les premiers temps de la Révolution, le château qui ne comptait pas moins de 48 pièces, fut finalement mis à sac en 1792, avant d’être vendu, par l’auteur à scandales, criblé de dettes, en 1796.

Passé entre les mains d’un député, d’un agriculteur puis d’un maçon, qui en utilisera les restes pour construire des maisons dans le village, il sera enfin sauvé par André et Nora Bouër. Jusqu’à ce que Pierre Cardin se prenne de passion pour les lieux, les restaure et y crée un festival avec la musique au coeur.

Le château se compose dorénavant d’une grande cour d’accueil, d’un théâtre en plein air de 1000 places et d’une salle d’une superficie de 1600 m² pouvant accueillir de 100 à 800 personnes en repas et jusqu’à 1600 personnes debout. Le château de Lacoste, y compris les cours et les fossés secs, ont fait l’objet d’une inscription aux Monuments Historiques par arrêté du 21 août 1992.

Si vous aimez les vieilles pierres et que vous êtes dans la région, sachez que durant tout l’été, du 01 juin au 30 septembre, des visites du château son organisée de 11h00 à 18h00 ; Organisation et réservation auprès du secrétariat de Pierre Cardin, au numéro suivant : 04 90 75 93 12.

Sources : Festival de Lacoste – Pierre Cardin / Photo : Village de Lacoste – Anonyme / Photo : Entrée du château de Lacoste – Anonyme

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