Du bon usage de la particule

Contrairement à une idée reçue, en France, que l’on soit noble ou pas, la particule qui précède un nom de famille ne prend jamais de majuscule (sauf en début de phrase). De plus, cette particule ne saurait en aucun cas être prise comme une preuve ou une marque de noblesse ; pas plus d’ailleurs que son absence empêche d’être noble : « René Descarte » était noble, bien que son nom n’ait pas de particule !

Ainsi, puisque la particule n’indique nullement la noblesse, il n’y a donc aucune raison d’établir une distinction. On écrira alors « Charles de Gaulle » — bien qu’il ne soit pas noble — sur le même modèle que « Donatien de Sade »… qui lui était bien noble.

L’Académie française précise d’ailleurs que ce n’est pas la particule qui fait la noblesse, mais l’anoblissement d’un patronyme auquel s’accole un nom de fief. Elle indique également que beaucoup de gens, par prudence et peur de l’échafaud, ont laissé tomber leur particule, là où d’autres la prenaient comme une indication de provenance (exemple : Dupont de l’Eure)… l’Empire, la Restauration, le deuxième Empire ont également créé des anoblissements sans particule : « Baron Gros, Baron Louis » et « Baron Gérard », en sont quelques exemples.

Comme la grammaire française adore les exceptions, il y a forcément une exception à cette règle : il s’agit du cas où la particule « de », « d’ », « des » ou « du » sont elles-même déjà précédées par la préposition « de » ; dans ce cas, et seulement dans ce cas-là, on mettra alors une majuscule afin d’éviter toute confusion entre la particule et la préposition. Ainsi, pour reprendre l’exemple du Général et celui du Marquis, cela donne : « J’ai écouté un discours de De Gaulle » et « J’ai apprécié lire les histoires de De Sade »… cependant, bien que correct sur la forme, on verra plus loin que le patronyme Sade dispose d’un traitement de faveur : à homme exceptionnel, mesure exceptionnelle !

Marquis de Sade - Du bon usage de la particule

La particule ne s’emploie donc que si elle est précédée d’un prénom, d’un titre ou d’une dénomination… jamais lorsque le nom est isolé. On dit ainsi : « Laurent de Galembert, le Comte de Galembert, Monsieur de Galembert ou la Famille de Galembert ».

Si l’on emploie le nom tout court, à moins que celui-ci soit composé d’une seule syllabe, commence par une voyelle ou un H muet, ou si la particule est « du », on dira : « Je viens de voir les Galembert » ou « Montgolfier fait du papier de qualité »… dans tous les autres cas, ce sera : « De Gaulle a gouverné la France », « D’Aspremont a mangé tout le jambon, « D’Hozier a publié le Grand Armorial de France » ou « Le Dogue noir de Brocéliande est Du Guesclin ».

Il n’y a que de rares occasions — et c’est là qu’arrive la mesure exceptionnelle — où la particule disparaît, laissant seul le nom, semblant marquer une certaine qualité du patronyme en question : c’est le cas avec « Retz, Maistre et Sade ». Mieux avec « Broglie » : en plus de voir disparaître sa particule en utilisation isolée, le nom s’articule d’une manière différente de celle affichée ; « Broglie », comme tout le monde le sait, se prononce « Breuil »… simple non ?

Attention au maniement des noms commençant avec « La », si la particule disparaît tout à fait normalement lorsque le nom est seul, le « La » en revanche reste : on dira alors « La Bruyère, La Fontaine ou La Fayette ». Autre subtilité : le « La » ne prend pas de majuscule lorsqu’il est précédé de la particule, mais il en prend une lorsque le nom est isolé. On écrit ainsi « Jean de la Fontaine », mais « Les fables de La Fontaine ».

Marquis de Sade - Du bon usage de la particule

La particule fonctionne donc comme une annexe du nom, c’est pour cette raison que l’initiale du nom usuel sert de référence dans un classement par ordre alphabétique et non la particule : « Sade », par exemple, se classe à S et non à D. En revanche, les noms dont la particule est « du » ou « des » sont classés à D ; de même en ce qui concerne les noms précédés de l’article « La », « Le » ou « L’ »« La Fontaine » sera classé à L et non à F.

Enfin, on ne fait jamais suivre l’appellation « Monsieur, Madame ou Mademoiselle » d’un titre. Ainsi, on évitera de dire « Monsieur le Comte » — ce qui est réservé au personnel de Maison — mais plutôt « Monsieur de Sade, Comte de Mazan » sauf en ce qui concerne le titre de « duc », où — pour les plus puristes — cette mention s’avère obligatoire pour tout le monde : on dit ainsi « Monsieur le duc » !

Pour l’anecdote, vous noterez, grâce à la carte du dessous trouvée sur le site de Baptiste Coulmont, que la noblesse de la fin du XIXe boudait l’Est parisien… ce qui est, selon l’auteur du blog, encore le cas de nos jours ; « les nobles », ou simplement la « vieille France », disposant de longue date d’un patrimoine, à deux titres : un patrimoine immobilier qui s’hérite et un autre financier qui permet de s’installer à proximité de ses semblables !

Marquis de Sade - Du bon usage de la particule

Sources : Photos – Hergé / Photos – A. Boissière / Article de Zul extrait du site nitescence.free