Calcul Sadiste

Si Donatien est, à n’en point douter, le plus célèbre des Aigles de sa famille… un autre Sade faillit, lui aussi, briller au firmament ; il s’agit du second fils du Marquis lui-même : Claude-Armand de Sade, marié le 15 septembre 1808 à Condé en Brie avec Louise Gabrielle Laure de Sade — sa cousine éloignée — à l’âge de 39 ans.

De cette union tardive perdura difficilement l’arbre des Sade jusqu’à nos jours. Ainsi, depuis le mariage de Claude-Armand jusqu’à la génération aînée actuelle, seul un Sade perpétuera à chaque degré la lignée familiale ; manquant de peu l’extinction du nom en le faisant rentrer dans l’histoire des familles qu’on raconte au passé. Certains diront que l’ombre maléfique du Marquis serait à l’origine de cette improbable généalogie, d’autres auront noté la mort tragique de plusieurs membres ayant vécu dans cet intervalle… une chose semble cependant certaine : l’arbre de la Maison des Sade, longtemps étriqué, s’élargit au moment où Sade choisit de sortir de l’enfer pour revenir dans la lumière !

Claude-Armand de Sade faillit briller au firmament, disais-je. Il s’en fallut, en effet, de peu que le fils fasse de l’ombre à son père. Claude-Armand, comme Donatien, aime les chiffres et voudrait apporter sa contribution au travail des mathématiciens de son temps. Ainsi, au début du 18ème siècle, en bon scientifique, le bonhomme écrira les mots suivants :

Marquis de Sade - Calcul Sadiste

« L’histoire des mathématiques nous prouve que les plus grands progrès que ces sciences aient obtenues ont été principalement dus à des changements de formes, à des nouvelles annotations, à l’emploi de quelques propriétés négligées qui ont été introduites dans les calculs de l’analyse. Les premiers algébristes désignaient les différentes puissances d’une quantité (a) en l’écrivant autant de fois qu’elle devait être multipliée par elle-même. Descartes pour abréger imagine d’écrire (a²) au lieu de (aa) ; (a³) pour (aaa) ainsi de suite. Cette simple simplification lui donna tout de suite la clé de la théorie des exposants, qui a donné par la suite, une si grande étendue aux calculs algébriques. L’emploi de logarithmes, des propriétés des lignes trigonométriques, & dans les formules analytiques ont permis de résoudre rigoureusement plusieurs problèmes dont les solutions eussent été impossibles, si l’on n’avait pas eu cette ressource. Cette raison m’a engagé d’essayer une nouvelle combinaison dans le calcul des séries et de chercher si l’on ne pourrait pas en tirer plusieurs résultats utiles, soit en simplifiant beaucoup d’opérations très compliquées, soit par des découvertes importantes. Je l’appelle “calcul sadiste” de mon nom. S’il réussit c’est une faible récompense pour le service que j’aurais rendu ; et s’il ne mène à rien ce calcul et mon titre resteront dans un entier oubli. »

Après avoir exposé un théorème du calcul différentiel destiné à simplifier la marche à entreprendre, Claude-Armand développe les principes de son calcul sadiste : « Sadifier une quantité, fonctions de x, c’est multiplier cette quantité par x, la différencier et diviser ensuite par dx. Ainsi la première sadification donnerait xⁿ = n + xⁿ ». Force est de constater que son calcul semble n’avoir mené à rien puisque personne ne s’en souvient ou semble avoir compris le procédé, et lui de rester anonyme dans l’ombre de son père.

Ayons quand même une petite pensée pour lui qui continue actuellement de compter éternellement au cimetière de Vallery dans l’Yonne ; n’hésitez pas à aller lui rendre visite… à lui et à sa femme, ils seront contents de voir que l’on pense encore à eux.

Sources : Photo – Anonyme