Écartelé d’argent et de sable

Aujourd’hui, la Lune prépare son premier quartier… elle est visible à 19 %. La Lune, cet astre qui accompagne nos nuits et génère les marées ; qui, dans les nuits sombres et silencieuses, préside aux pratiques mystérieuses autant qu’à celles magiques ; et qui, dans les vœux des amants, est invoquée pour les sublimer sous les fenêtres des dames convoitées.

Très présente dans de nombreuses mythologies et croyances folkloriques, la Lune a souvent été associée à des divinités féminines. Ainsi, la déesse grecque Séléné a été associée à celle-ci, avant d’être supplantée par Artémis. Ce qui n’est pas le cas au Japon, où la déesse Amaterasu est associée au Soleil et son frère, Tsukuyomi, à la Lune ; de même chez les Mésopotamiens, où le dieu Nanna — non, non, ce n’est pas une blague ^^ — est lui aussi associé à l’astre lunaire.

Marquis de Sade - Écartelé d'argent et de sable

Mais revenons à Artemis ou, du moins, à son pendant romain : Diane. Sœur d’Apollon, elle est adorée comme déesse de la chasse et comme divinité qui assiste à la naissance. Venue au monde quelques instants avant son frère, témoin des douleurs maternelles, elle conçut une telle aversion pour le mariage, qu’elle demanda et obtint de son père la grâce de garder une virginité perpétuelle comme Athéna. Jupiter l’arma lui-même d’un arc et de flèches, et la fit reine de la chasse. Diane, reçue également de son père, un cortège de soixante nymphes, appelées Océane, et vingt autres nommées Asie, dont elle exige une inviolable chasteté. Toutes ses nymphes sont grandes et belles, mais la déesse les surpasse toutes en taille et en beauté. Avec ce nombreux cortège, elle se livre à la chasse, son occupation principale.

Le prénom de Diane est une forme adjective issue d’un ancien « divius », correspondant au latin « divus », « dius », comme dans « Dius Fidius », « Dea Dia » et au neutre « dium » signifiant le ciel. La racine indo-européenne signifie le ciel lumineux ou ciel diurne, que l’on retrouve également dans le Latin deus (dieu, originellement dieu du ciel diurne), dies (jour), et dans le nom de Jupiter, contraction de « Dius Pater ». Diane serait donc à l’origine la « Divine », c’est-à-dire l’incarnation féminine de la lumière du jour.

Quand Apollon (le Soleil) disparaît à l’horizon, Diane (la Lune) resplendit dans les Cieux et répand discrètement sa lumière dans les profondeurs mystérieuses de la Nuit. Ces deux divinités ont des fonctions non identiques, mais semblables : alternativement, elles éclairent le monde ; de là leur caractère de fraternité.

Marquis de Sade - Écartelé d'argent et de sable

Plus proche de nous, Diane de Joannis — que l’on dit être une arrière-petite-nièce de Nostradamus — était appelée « Mademoiselle de Chateaublanc », du nom d’une propriété que possédaient ses parents près d’Avignon.

Très jeune, elle épouse Dominique de Castellane, qui l’emmène avec lui à la cour à Versailles. Brune, d’une très grande beauté, la Marquise de Castellane, surnommée « La Belle Provençale », fut remarquée par le roi Louis XIV et eut l’honneur en octobre 1655 de danser avec lui le septième ballet de la Nuit dans le rôle d’Artémise.

Nommé gouverneur des galères royales, son mari fut envoyé en Méditerranée où, à la suite d’une tempête, ses navires coulèrent et il mourut noyé.

Devenue veuve, la Marquise se retire dans un couvent d’où elle ne se décide à sortir que quelques années plus tard à la suite d’une visite de son ami, le duc de Candale.

Le 8 août 1658, elle se remarie avec un jeune et brillant aristocrate languedocien, Charles de Vissec de Latude, Comte de Ganges (1639 – 1737), Baron des États de Languedoc, Gouverneur de Ganges, Lieutenant du Roi de la Finance du Languedoc, Commandant du Fort Saint-André à Villeneuve-lès-Avignon, dont le fief sera, le 30 juin 1666 (date d’enregistrement au Parlement de Toulouse), érigé en marquisat.

Le 30 mars 1663, la Marquise devient la légataire de son riche grand-père. Se sentant menacée, le 19 mai 1664 elle rédige en faveur de ses enfants un testament qui déshérite son mari… ce qui est contraire aux usages de l’époque.

Elle se heurte très vite à l’agressivité de ses deux beaux-frères, Henri, dit l’Abbé, bien qu’il ne fut pas homme d’Église, et Bernardin, le Chevalier de Ganges. Certains auteurs prétendent que ce fut en raison des avances qu’ils lui avaient faites et qu’elle avait repoussées avec mépris ; d’autres pensent que le but était de faire pression sur elle et de la contraindre à annuler ce testament qui, en défavorisant leur frère, les désavantageaient aussi… eux qui vivaient fréquemment au château de Ganges.

Après avoir vainement essayé plusieurs tentatives d’empoisonnement à l’arsenic avec la complicité d’un prêtre, l’Abbé Perrette, ils la contraignent à avaler un breuvage brunâtre qu’elle s’empresse de vomir en se glissant dans la gorge une de ses nattes. Elle s’enfuit alors en sautant par la fenêtre de sa chambre et réussit à s’enfuir dans le village et à se réfugier chez des amis. Cependant les assassins la poursuivent et l’achèvent à coups de poignard. Elle meurt quelques jours plus tard, le 5 juin 1667, à l’âge de 32 ans.

L’Abbé et le Chevalier sont condamnés par contumace par le Parlement de Toulouse, dès le 21 août 1667, à être rompus vifs et l’Abbé Perrette, envoyé aux galères, mourra de mauvais traitement avant même de monter sur un navire.

Quant au Marquis de Ganges, il est difficile de mesurer le degré de sa culpabilité. Il siégeait, d’une part, aux États de Languedoc tenus à Toulouse au moment du crime, et il fut, d’autre part, innocenté par sa femme avant sa mort… souhaitant sans doute préserver l’honneur de la famille de ses enfants.

Le Marquis de Ganges sera donc condamné au bannissement pour sa complicité passive et à la confiscation de ses biens. Il rentrera cependant clandestinement en France et mourut à L’Isle-sur-la-Sorgue, à l’âge de 99 ans, à quelques encablures du château du Marquis de Sade.

Marquis de Sade - Écartelé d'argent et de sable

L’assassinat de la Marquise de Ganges eut un grand retentissement dans tout le royaume pour différentes raisons. La première était l’atrocité du crime ; la seconde, la personnalité de la Marquise, fort belle et fort sage, qui, jusqu’au décès du Marquis de Castellane, avait vécu à la Cour, où elle était fort appréciée du roi ; la troisième, pour la réputation de la famille de Vissec de Latude, l’une des plus anciennes et des plus nobles du Languedoc ; et enfin la personnalité des assassins, deux de ses beaux-frères.

Cette histoire n’a pas manqué de faire l’objet de nombreux canards, ces petits journaux contenant un seul article teinté de sensationnel, que les colporteurs allaient vendre à travers villes et campagnes.

Si les minutes du procès des assassins contiennent des faits proches de la vérité, les écrivains qui reprirent l’histoire n’hésitèrent pas à ajouter des détails et des anecdotes de plus en plus romanesques, tout en affirmant avoir les informations les plus fiables. C’est le cas notamment du Marquis de Sade qui n’avait, semble-t-il, comme source pour sa Marquise de Gange — écrit sans « s » — que le récit déjà déformé de Gayot de Pitaval.

Aujourd’hui 9 juin, je vous prie de penser à Diane car c’est le jour où nous fêtons celles-ci. Pensez à elles, mais aussi aux Artemis ainsi qu’à toutes les nymphes… sans qui la beauté des femmes et celle de la Nature ne seraient rien.

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Détails sur les produits :
Titre : « La Marquise de Gange »
Édition : Jean-Jacques Pauvert (1961)
ASIN: B002TXP3JY

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Sources : Merci Wiki / « Artemis » – Michael C. Hayes / « Le Soleil a rendez-vous avec la Lune » – Anonyme / « Diane de joannis de Chateaublanc » – Anonyme / « La Marquise de Gange » – Marquis de Sade

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