Saumane et son mystérieux château

Le Château de Saumane, dans le Vaucluses, constitue en matière d’architecture défensive l’un des exemples les plus spectaculaires dans la liste, pourtant longue, des châteaux de Provence. Cette singularité est due notamment à l’association au sein d’un même ensemble d’un palais de cardinal daté du XIVe siècle et d’une villégiature d’époque Renaissance aux allures de bastion imposant.

Un article de Catherine Inacio.

Le monument occupe un éperon naturellement défendu et utilisé avant la romanisation en tant qu’oppidum celto-ligure, si l’on se réfère aux nombreux indices archéologiques reconnus aux abords. La topographie se prêta ainsi particulièrement à la création au Moyen-Âge d’un site perché, défendu par une enceinte, et doté d’un premier château de type féodal dont subsistent d’intéressants vestiges dans la partie méridionale de l’éperon.

Marquis de Sade - Saumane et son mystérieux château

L’abbé de Sade, oncle du Marquis de Sade, vécut au château de Saumane trente-cinq ans. C’est le père du Marquis qui l’avait confié à son frère pour parfaire son éducation… Un Abbé très libertin, ami de Voltaire, et bon écrivain, qui rédigea d’ailleurs la première biographie qui parut sur Pétrarque. Le jeune Marquis fut très influencé par son séjour dans le château de l’âge de 4 à 10 ans, par le cadre qui l’entourait et par les rayons de livres libertins qui tapissaient la bibliothèque de l’abbé.

Dès cet été, cette histoire passionnante pourra être à nouveau racontée par les guides qui feront visiter le château, fermé aux visiteurs depuis quelques années pour travaux. Une réouverture très attendue par Gilbert Trouiller, vice-président de la communauté de communes, Pays des Sorgues Monts de Vaucluse , délégué à la gestion des biens patrimoniaux et Carole Maluski, directrice Tourisme. Un château qui, outre ses illustres propriétaires -de 1451 à 1868, il appartint à la famille de Sade- se caractérise aussi par une histoire architecturale unique, « harmonieuse », se réjouit Carole Maluski, une histoire faite de différentes tranches de travaux allant du XIVe siècle au début du XXe siècle.

Marquis de Sade - Saumane et son mystérieux château

En 2010, la communauté de communes présidée alors par Catherine Légier, décide de sa réhabilitation. Le choix se porte sur la signature d’un PER (Pôle d’excellence rurale) afin de favoriser les métiers d’art. « En 2014, explique Gilbert Trouiller, la nouvelle équipe a repris le dossier et a conservé cet axe de métier d’art en prenant contact avec l’association des muraillers de Provence ». Ainsi depuis le 1er mars, une convention a été signée et « l’école de la pierre sèche » est désormais située au château de Saumane. L’annexe extérieure du château, très bien restaurée aussi, servira de lieu d’accueil des élèves et des professeurs pour les cours théoriques et pourra accueillir les stagiaires grâce à neuf chambres de deux personnes.

Les constructions de pierre sèche façonnent les paysages de Provence (et d’ailleurs), et tout autour du château, les élèves pourront s’entraîner « in situ » sur les restanques situées dans le vallon de La Tapy qui sera donc leur terrain d’application. Trois écoles d’ingénieurs ont validé cette méthode de construction. Les travaux de restauration sont presque terminés. Le château ouvrira d’abord ses portes au public avec des visites guidées cet été. Puis, les responsables de la communauté de communes analyseront l’impact, notamment touristique, de ce joyau du patrimoine vauclusien afin peut-être de l’ouvrir plus largement.

Marquis de Sade - Saumane et son mystérieux château

« Ce château, c’est un lieu magique, exceptionnel, avec la citadelle d’un côté, la façade Renaissance de l’autre ». Thibault de Sade, descendant avec ses deux frères, du Divin Marquis, vit en région parisienne, mais vient régulièrement dans la région à laquelle il reste attaché. Il est ravi des embellissements réalisés dans le château, dont il souhaite qu’il devienne aussi connu que celui de Lacoste. Il évoque le sous-sol taillé dans le roc, la partie médiévale, les cachots… « On voit l’histoire couche par couche ». Il loue l’escalier intérieur, « une splendeur », la salle des murmures, « exceptionnelle ». Les escaliers dérobés, les mâchicoulis, tout l’inspire. « Par temps d’orage c’est incroyable », ajoute-t-il.

« Ce sont mes parents qui ont choisi de réhabiliter le nom qui était devenu tabou en 1814. Le fils du Marquis avait mis sur cette existence une chape de plomb : il ne fallait plus en parler. À la demande d’un écrivain, en 1945, mes parents ont cherché les archives familiales, ont trouvé des malles, et les ont ouvertes à une seule condition, que l’on dise la vérité. Ils ont découvert cet homme qui avait été occulté par sa famille ». Du côté des œuvres, les manuscrits qui se trouvaient à la Bastille pendant sa captivité ont disparu. Une autre partie a été perdue à sa mort à Charenton. Restaient des correspondances, des pièces de théâtre…

« Dans les “120 journées de Sodome”, il évoque un château, que l’on avait situé dans la Forêt Noire, en fait c’est bel et bien celui de Saumane ». Le livre le plus effrayant sans doute de l’auteur, qui « démontre comment les hommes basculent dans le côté bestial le plus terrible ». Thibault de Sade indique que son aïeul était un homme très érudit. « Saumane a eu une grande influence sur lui quand il était jeune. C’était un “lieu de théâtre”». La famille a donc prévu de prêter certains documents qui pourront être exposés. « Nous soutenons la communauté de communes dans sa volonté de faire revivre ce lieu ».

Sources : Le site de la mairie de Saumane / L’article de Catherine Inacio pour La Provence / Photos – Marquis de Sade

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