1 — Raisonnable ou non, tout s’en mêle…

Il fait chaud, les jupes raccourcissent, le teint devient hâlé… ça y est, c’est sûr, l’été est là. Les journées n’en finissent pas, le Soleil est haut dans le ciel, les nuits sont courtes, peut-être un peu trop mais c’est une autre histoire.

Afin de pouvoir profiter au maximum de cette période que tout le monde attend avec impatience, je vous propose de marquer une pause éditoriale… Ainsi durant les deux mois qui vont suivre je vous parlerais de poésie !

Connaissez-vous le dizain ? Il s’agit d’une strophe ou un poème de dix vers. Dans la poésie française, cette forme a souvent été utilisée au XVe siècle et au XVIe siècle, notamment par Maurice Scève mais aussi par Joachim du Bellay. Le dizain comme forme de poème a ensuite été délaissé jusqu’à ce que Sade le reprenne dans son « Histoire de Juilette » en paraphrasant le célèbre poème d’Alexis Piron ; pastiche qu’il attribue au cardinal de Bernis.

« L’Histoire de Juliette ou les Prospérités du vice », roman écrit et publié par le Marquis de Sade, est le second volet d’une autre œuvre : la fameuse histoire de « Justine ou les Malheurs de la vertu »… Justine étant la soeur de Juliette. Justine, martyr de l’Histoire et Juliette, incarnation de l’Histoire, mais toutes deux témoins à charge de l’Histoire. Le roman suit Juliette de l’âge de treize ans à environ trente ans. Juliette commence le récit de sa vie par son éducation au couvent de Panthemont où la supérieure, Madame Delbène, lui inculque les premiers principes de la luxure et de l’immoralité. La publication de ces deux ouvrages licencieux a valu au Marquis de Sade d’être arrêté sur ordre de Napoléon et d’être incarcéré sans procès à l’asile de Charenton jusqu’à la fin de ses jours.

Marquis de Sade - 1 — Raisonnable ou non, tout s’en mêle...

Mais revenons à nos moutons… ou plutôt au pastiche du célèbre poème de Piron : « l’Ode à Priape » !

Bourguignon de naissance, Alexis Piron composa cette ode aux alentours de 1710, vers l’âge de vingt ans. L’immoralité fameuse de ce texte malgré un vrai talent, le poursuivit toute sa vie durant ; elle lui fut à la fois un titre d’une gloire quelque peu sulfureuse, en même temps qu’un boulet qu’il dut traîner et qui finit par lui fermer les portes de l’Académie française en 1753.

Comprenant le personnage et le texte de celui-ci, il n’en fallut pas plus à Sade pour inclure dans son œuvre l’illustre poème. C’est donc dans « l’Histoire de Juliette » sous forme de pastiche que ressurgit Piron quelque vingt-cinq ans après sa mort, remettant ainsi le dizain au goût du jour.

Dans le texte de Sade, cela donne ça…

Foutre des Saints et de la Vierge,
Foutre des Anges et de Dieu !
Sur eux tous je branle ma verge,
Lorsque je veux la mettre en feu…
C’est toi que j’invoque à mon aide,
Toi qui dans les culs, d’un trait raide,
Lanças le foutre à gros bouillons !
Du Chaufour, soutiens mon haleine,
Et pour un instant, à ma veine
Prête l’ardeur de tes couillons.

Que tout bande, que tout s’embrase ;
Accourez, putains et gitons :
Pour exciter ma vive extase,
Montrez-moi vos culs frais et ronds,
Offrez vos fesses arrondies,
Vos cuisses fermes et bondies,
Vos engins roides et charnus,
Vos anus tout remplis de crottes ;
Mais, surtout, déguisez les mottes :
Je n’aime à foutre que des culs.

[…]

À la fin de la verve de l’histrion Bernis, les applaudissements fusèrent. Juliette ajoutant que « cette ode fut trouvée bien plus forte que celle de Piron [et] unanimement accusé de poltronnerie pour avoir niché là les Dieux de la fable, quand il n’aurait dû ridiculiser que ceux du christianisme. »

Mais laissons Piron nous conter l’original…

Foutre des neuf Grâces du Pinde,
Foutre de l’amant de Daphné,
Dont le flasque vit ne se guinde
Qu’à force d’être patiné :
C’est toi que j’invoque à mon aide,
Toi qui, dans les cons, d’un vit raide
Lance le foutre à gros bouillons,
Priape ! soutiens mon haleine,
Et pour un moment dans ma veine
Porte le feu de tes couillons.

Que tout bande !! que tout s’embrase
Accourez, putains et ribauds !
Que vois-je ? où suis-je ? ô douce extase !
Les cieux n’ont point d’objets si beaux :
Des couilles en bloc arrondies,
Des cuisses fermes et bondies,
Des bataillons de vits bandés,
Des culs ronds, sans poils et sans crottes,
Des cons, des tetons et des mottes,
D’un torrent de foutre inondés.

[…]

Dans le roman du Marquis, l’histoire est agrémentée de jolies images censées illustrer les propos de Juliette. C’est pourquoi, chaque semaine, durant les neuf qui vont suivre, afin d’attiser votre œil lubrique, en plus de la suite du pastiche de Bernis et du poème de Piron, vous aurez le droit de découvrir — ou redécouvrir — une des gravures attribuées à Claude Bornet présente dans la version de « l’Histoire de Juliette » datant de 1797 mais colorisées en 1870 ; voici la première !

Marquis de Sade - 1 — Raisonnable ou non, tout s’en mêle...

Comme je vous sais en vacances, loin des tourments habituels, et vous sentant la plume facile, je voudrais que vous fassiez — ou non — un petit exercice (une sorte de devoir de vacances en quelque sorte). L’exercice, vous l’avez deviné est d’écrire un dizain sur le thème de Juliette ou, si l’inspiration vous manque, un épigramme sur Sade en général. Une fois votre œuvre créée, ne me l’envoyez pas, postez-la directement sur la page Facebook du Carnet du Marquis de Sade (la page n’est accessible qu’aux personnes inscrites sur Facebook et ayant plus de 18 ans). L’été fini, le meilleur dizain ou épigramme sera repris dans un article du blog.

Le mot de la fin à Piron… qui nous sert ici sa propre épitaphe.

Ci-gît Piron
qui ne fut rien,
Pas même académicien.

Détails sur le produit :
Nom : Histoire de Juliette ou les prospérités du vice.
ISBN-13: 978-1502722430

« Histoire de Juliette ou les prospérités du vice » du Marquis de Sade est disponible à l’achat sur l’échoppe du site. Pour vous procurer le ou les ouvrages vous intéressant, veuillez vous rendre dans l’échoppe en cliquant sur le titre en question. Si vous ne trouvez pas l’œuvre voulue, cela veut simplement dire que notre partenaire Amazon ne l’a pas, ou plus, en stock ; auquel cas, nous vous conseillons de revenir ultérieurement dans l’échoppe pour vérifier si elle a été achalandée.

Sources : Photos – Anonyme & Claude Bornet

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