De la terre une fumée, comme la fumée d’une fournaise !

« Combien de fois, sacredieu, n’ai-je pas désiré qu’on pût attaquer le soleil »… voilà une citation qui, hormis le fait que celle-ci soit de Sade, pourrait sortir tout droit de la bouche d’un autre personnage mythique : Icare, le fils de Dédale ; Icare, celui-là même qui voulu « attaquer » le Soleil !

« Sade, attaquer le Soleil », du 14 octobre 2014 au 25 janvier 2015, est une exposition temporaire du musée d’Orsay à Paris ; suivant l’analyse d’Annie Le Brun, l’exposition met en lumière la révolution de la représentation ouverte par les textes de l’écrivain. Sont abordés les thèmes de la férocité et de la singularité du désir, de l’écart, de l’extrême, du bizarre et du monstrueux, du désir comme principe d’excès et de recomposition imaginaire du monde, à travers des oeuvres de Goya, Géricault, Ingres, Rops, Rodin, Picasso…

Le caractère violent de certaines oeuvres et certains documents est susceptible de heurter la sensibilité des visiteurs.

Petit retour en arrière… juste assez pour s’arrêter à une époque où, chez certains, le Soleil était de genre féminin et où, chez d’autre, l’amour bestial pouvait finir en épopée.

Ayant déclenchés les foudres de leur roi, Icare et son père Dédale se retrouvèrent enfermés dans le « Labyrinthe » que ce dernier avait conçu pour y enfermer le « Minotaure » : fils des amours interdites entre la femme du roi et un très beau taureau.

Ne pouvant emprunter ni la voie des mers, ni celle de la terre pour sortir de leur prison, Dédale eut l’idée de prendre celle des airs en fabriquant des ailes avec de la cire et quelques plumes. L’ouvrage terminé, il mit en garde son fils contre les méfaits de la chaleur du Soleil ; mais Icare, grisé par le vol, oublia les paroles de son père et entreprit d’approcher l’Étoile Divine… son but ? Séduire la Reine du Ciel, espérant — secrètement — la connaître ? Plaire à la Déesse et décrocher ses faveurs ?… Nul ne le sait, les textes sacrés n’en disent pas plus.

Ce que l’on sait part contre, c’est qu’Icare, prenant trop de hauteur, chauffé par l’amour ardent de sa Belle, finit par faire fondre sa cire et brûler ses plumes ; provoquant, de fait, une situation critique. C’est ainsi qu’Icare, sous les yeux horrifiés de son père, parti rejoindre le royaume profond de celles qui brillent dans le noir, offrant ainsi son nom à la mer qui lui servit de point de sa chute.

En désobéissant aux conseils de Dédale, Icare se retrouve puni. Le Soleil étant considéré comme un dieu, il s’agit ici d’une punition divine. Icare est donc condamné à mourir pour avoir voulu se rapprocher trop près d’un Dieu ; faisant preuve d’orgueil à s’imaginer l’égal de celui-ci.

Marquis de Sade - De la terre une fumée, comme la fumée d'une fournaise !

Sade, lui, va plus loin. Sublimant l’Être Divin en proposant de l’utiliser contre l’Homme, contre l’humanité : « Combien de fois, sacredieu, n’ai-je pas désiré qu’on pût attaquer le soleil, en priver l’univers, ou s’en servir pour embraser le monde », Sade met l’Homme dans le noir pour mieux le perdre… dans l’interdit.

N’oubliez pas que nous sommes à cette époque où le Soleil est féminin. Dans une heureuse bascule des genres, le Soleil est donc La Grande Déesse, celle qui initie l’homme, celle qui place la femme comme clef de voûte du grand jeu divin ; la Mère où vient s’égarer l’extase de l’Amour sacré, celle qui fournit l’étincelle pour embraser le Monde.

Sade, par sa citation, semble donc — inconsciemment — vouloir utiliser la femme et son potentiel sacré comme outil pour asservir et détruire le Monde… un juste retour de bâton en ces temps où femmes corbeaux et prêcheurs obscurantistes pullulent, croissant et se multipliant aussi vite que le voulait le Verbe initial.

Détails sur le catalogue de l’exposition :
Broché: 336 pages.
Editeur : Gallimard (24 octobre 2014).
ISBN-10: 2070146820
ISBN-13: 978-2070146826

« Sade. Attaquer le soleil. » d’Annie Lebrun est disponible à l’achat sur l’échoppe du site. Pour vous procurer le ou les ouvrages vous intéressant, veuillez vous rendre dans l’échoppe en cliquant sur le titre en question. Si vous ne trouvez pas l’œuvre voulue, cela veut simplement dire que notre partenaire Amazon ne l’a pas, ou plus, en stock ; auquel cas, nous vous conseillons de revenir ultérieurement dans l’échoppe pour vérifier si elle a été achalandée.

Sources : Photo d’un anonyme

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