Le crâne t’a mangée !

« Faut-il brûler Sade ? », s’interrogeait Simone de Beauvoir dans un article sur la littérature et le mal. Michèle Sauberli, lectrice à ses heure de « Justine ou les infortunes de la vertu » et de « La philosophie dans le boudoir », ne se pose, quant à elle, pas la question. À l’occasion du bicentenaire de la mort du divin marquis (disparu le 2 décembre 1814 à 74 ans dans un asile d’aliénés), elle, la peintre passionnée par l’art du portrait, a saisi ses pinceaux et croqué le sulfureux prince de l’érotisme. En l’absence de représentation avérée de l’écrivain délinquant — il passa plus d’un tiers de sa vie en prison ! — on l’imaginait, tel qu’en ces vieux jours, le regard libidineux, le visage bouffi, la lippe salace.

Tout faux ! Visiblement inspirée par Van Loo (un portrait dont l’authenticité est plus que douteuse, d’ailleurs), elle l’a peint de profil, jeune, emperruqué, quasiment sage. « Je l’imagine ainsi », sourit-elle, « cachant bien son jeu ». L’ensemble cependant ne manque pas de force : à cause du trait, vigoureux et spontané de la peintre montbéliardaise, certes, mais aussi du support. L’artiste a pris un antique papier photo appartenant à son père et y a essayé différentes techniques. Même de l’écriture : des « Sade » rouges et minuscules parsèment ainsi les joues de celui qui fut, aussi, un athée militant. De loin, on voit apparaître peu à peu sur le jeune visage la couperose due (dans son cas) à une vie dissolue. « Je n’avais pas encore explorer ces techniques, je teste », souligne Michèle Sauberli, « Et j’adore ça ! ».

Marquis de Sade - Le crâne t’a mangée !

À 72 ans, la peintre — reconnue dans toutes les galeries, mais de manière très réductrice, pour ses fleurs géantes et sensuelles — est plus que jamais créative. Tout l’inspire, des 700 ans de la disparition sur le bûcher du grand maître des Templiers à la coupe du monde de foot en passant par le conflit syrien. Et même son propre décès. Pour l’exposition du Graal (groupe de peintres amateurs et professionnels de l’Aire urbaine), qui se tiendra en mars à la Tour 46 de Belfort, elle a réalisé deux autoportraits. L’un avant, l’autre après son décès : sur fond rouge, la tête de mort, décorée de minuscules photos de Michèle vivante, est particulièrement frappante. « J’ai une peur terrible de la mort, mais, au moins, je m’en amuse ! Mon petit-fils, en voyant ça, m’a dit : Mamie, le crâne t’a mangée ! ».

Tous ces portraits, ainsi qu’une planche reproduisant 26 de ses plus grandes toiles (dont le très beau commandant Massoud et le presque jamais exposé Ben Laden) seront donc présentés, dans le Territoire dans quelques mois. Michèle Sauberli y exposera, auréolée d’un prestigieux nouveau titre : elle vient d’être acceptée comme sociétaire à la fondation Taylor à Paris : l’organisme promet les peintres et sculpteurs et offre des prix dans les plus grands salons artistiques de l’Hexagone.

Un article de Sophie Dougnac.

Sources : Un article du journal « Est Republicain » / Photo – Site de Michèle Sauberli

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